(English follows)
Les cartes manuscrites sont des documents rares, dans la mesure où la grande majorité des cartes géographiques anciennes qu’on rencontre habituellement sont des documents imprimés, souvent réalisés à partir d’un original disparu. Quelle ne fut pas notre surprise, lorsque Geneviève Thibodeau, adjointe aux collections à notre musée, a découvert dans nos réserves une longue pochette de toile que personne auparavant n’avait encore remarquée – ni répertoriée dans l’inventaire de nos collections et archives. Le sac de toile contenait quatre cartes enroulées, dont trois étaient des exemplaires gravement endommagés de la célèbre carte imprimée de Putnam & Grey, représentant les Cantons-de-l’Est en 1863. (Le mauvais état de ces trois cartes est malheureusement irrémédiable – cependant, nos archives en possèdent un autre exemplaire en bon état, exposé en permanence dans le local des Archives).
Par contre, la quatrième carte, montrant l’est des États-Unis, l’ensemble des Grands Lacs et le sud du Québec, apporte une surprise de taille, sans compter que son état de conservation est assez sartisfaisant. Cette découverte est surprenante à plus d’un titre : d’une part, le document est une carte manuscrite – entièrement dessinée et colorée à la main; et, d’autre part, son auteur est Lemira Strong, celle-là même qui deviendra en 1826 l’épouse de Moses French Colby, qui installa sa famille à Stanstead en 1832. Chose plus étonnante encore, la carte porte la date de 1823, alors que la jeune Lemira n’avait encore que 17 ans. Or il s’agit d’une carte extrêmement détaillée, particulièrement bien exécutée à la plume à l’encre noire, avec des rehauts peints en bleu, vert et rouge.
Réalisée sur six feuilles de papier, contrecollées sur une pièce de toile qui s’enroule sur une baguette de bois, la carte présente des dimensions de 101 cm x 118,5 cm. Elle comporte en sa partie inférieure droite un large cartouche peint portant le titre « A Map of the United States of America », avec la signature et la date : « Lemira Strong 1823 ». Il semble possible que les informations détaillées qui figurent sur cette carte reposent sur plusieurs sources cartographiques différentes, avec des indications de frontières marquées en rouge qui délimitent les états américains selon des tracés qui se sont transformés depuis. En outre, le tracé de la frontière entre le Québec et les états du Vermont et du New-Hampshire suit un parcours inusité, du fait que la frontière canado-américaine était encore contestée à l’époque, car ce n’est qu’en 1842 que le Traité Ashburton allait mettre fin au débat (en partie sur la base d’arpentages effectués par Joseph Bouchette en 1827). Lemira Strong inscrit du reste un commentaire le long du tracé frontalier, que nous n’avons pas encore réussi à déchiffrer étant donnée la finesse de l’inscription sous l’enduit foncé qui le recouvre.
Lemira Strong (Colby) naquit en 1806 à Pawlet au Vermont. Nous savons peu de choses sur elle avant 1826, l’année où elle épouse le docteur Moses French Colby qui habite alors à Derby Line. En 1827, elle donnera naissance à son fils ainé, Charles Carroll Colby, et plus tard à d’autres enfants. Ce n’est qu’en 1831 que Moses Colby établissait son cabinet de médecin à Stanstead Plain, suivi l’année suivante par Lemira et toute la famille. Il semble bien qu’en 1823, Lemira Strong était déjà enseignante, malgré son jeune âge, car la carte manuscrite que nous avons retrouvée (apparemment inconnue de la famille elle-même jusqu’à présent) est précisément le genre de carte déroulante qu’on utilisait autrefois pour l’enseignement, affichée contre le mur ou suspendue devant le tableau noir.
L’état de conservation de la carte de Lemira Strong, bien que très satisfaisant, imposera tout de même un travail de restauration important avant que d’être exposée au public. Quelques déchirures marginales, ainsi qu’un décollement et des plis dans les bords de certaines feuilles, devront être réparés professionnellement – sans compter une mise à plat de l’ensemble, au terme de plus de 185 ans à rester roulée sur elle-même ! La carte a également reçu un vernis protecteur (possiblement un « shellac ») qui a sévèrement bruni au fil des ans, et qui s’est craquelé et écaillé en maints endroits, laissant apparaître la surface blanche du papier, mais aussi... le tracé presque intact des indications à l’encre et des couleurs peintes. Il est ainsi possible que les experts en restauration de papiers puissent retirer le vernis brun sans endommager davantage le contenu de cette carte. Une histoire à suivre...
Artiste inconnu / Unknown artist, Portrait de/of Lemira Strong Colby, ca 1840 Huile sur toile / Oil on canvas Collection Musée Colby-Curtis Museum |
Manuscript maps are rather scarce documents, as most of the geographical maps that one encounters are usually printed copies, often drawn from a lost original. Consequently, we were quite surprised when Geneviève Thibodeau, assistant curator to the museum’s collections, uncovered a long canvas pouch in our reserves which no one had previously noticed – nor listed in the inventory of our collections and archives. The pouch held four four large maps rolled upon wooden holders, three of which were severely damaged copies of the famous printed map by Putnam & Grey, showing the Eastern Townships in 1863. (The poor condition of these maps is unfortunately irreversible – however, our archives hold another copy of the map in rather good condition, displayed permanently in our Archive center).
The fourth map, showing the United States, with the full extent of the Great Lakes and southern parts of Quebec, brought us a really pleasant shock, not to to speak of its very satisfying state of preservation. This discovery was surprising for many other reasons : first, the document is a manuscript map – entirely hand-drawn and painted; second, the author of the map is none other than Lemira Strong, who became in 1826 the wife of Moses French Colby, which settled his family in Stanstead in 1832. Moreover, the map bears a date, 1823, when young Lemira was at the time only 17 years old. Quite surprisingly, the map is extremely detailed, and very handsomely drawn and inscribed in black ink, with painted highlights in blue, green and red.
Combining six sheets of paper mounted on a piece of canvas, itself rolled on a piece of wood, the map measures 101 cm x 118,5 cm. In the lower right, a large painted "cartouche" bears the title A Map of the United States of America, with a signature and date : Lemira Strong 1823. It seems possible that the detailed information found on this map could have been compiled from various cartographic sources, along with red painted indications for borders that show boundaries between American states that have since changed. As well, the boundary line between Quebec and the States of Vermont and New Hamphire follows an unusual tracing, since the Canada-United States border was still the object of debate at the time. Indeed, the border line was finally agreed upon in 1842, when the Ashburton Treaty brought an end to the border contest (a treaty based in part on surveys done by Joseph Bouchette in 1827). As a matter of fact, Lemira Strong inscribed a written comment along the border line, which we haven’t yet managed to decipher, owing to its delicate writing under the dark-brownish coating that covers the map.
Lemira Strong (Colby) was born in 1806 in Pawlet,Vermont. Not much is known about her before 1826, the year she wed Dr Moses French Colby, then living in Derby Line. In 1827, she would give birth to her elder son, Charles Carroll Colby, and later to more children. However, it was only 1831 when Moses Colby removed his physician’s office to Stanstead Plain, followed a year later by Lemira and the family. It appears that in 1823, Lemira Strong was at the time a teacher, already at such a young age, since the manuscript map we have uncovered (apparently unknown to the family itself until now) precisely belongs to the type of scrolled maps which were used years ago as teaching aids, up against the schoolroom wall or hung against the blackboard.
The condition of this map, however satisfying, will anyhow require important restoration work before being shown to the public. Some marginal tears and losses, and folds in the edges of certain paper parts, will need to be repaired professionally – but the map will also require some degree of overall flattening, after more than 185 years of being rolled up ! As well, the map has received a protective coating a good while back (possibly a "shellac" or some other type of varnish) which has darkened severely over time, and which has cracked and flaked off in many places, uncovering the white surface of the paper, but also... the apparently intact ink tracings and painted colours. Thus, it may be possible that paper restoration experts can remove the old brownish coating without damaging any further the contents of this map. We’ll soon see...
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